Projets spéciaux

Éducation 3e Âge (ETA) offre à ses membres l’occasion de s’engager et de jouer un rôle actif dans certains grands dossiers de l’actualité. Ses projets spéciaux visent le bien-être collectif.

 

Chantier Éducation est un comité ad hoc qui agit toujours dans un cadre donné, dicté par le contexte sociopolitique, avec un mandat précis du conseil d’administration, de l’assemblée générale annuelle ou du comité de liaison, donc avec l’aval des membres d’ETA.


Campagne électorale 2018 ‑ Réflexions sur l’éducation

Par Rose-Lise Blanchette, présidente d’ETA

pour le comité Chantier Éducation*

Sérieusement

Les membres du comité Chantier Éducation travaillent sérieusement depuis le printemps dernier sur l’enjeu de l’éducation en vue d’intervenir dans la présente campagne électorale. Lectures, recherches, veille média, participation à des conférences, rencontres… maints efforts ont été déployés pour tenter de faire le tour de ce vaste champ qu’est l’éducation.

Quelle école voulons-nous? La question est sur toutes les lèvres, et y répondre n’est pas simple. Du moins brièvement. La liste des lacunes est longue: 53 % des Québécois sont des analphabètes fonctionnels1; quelque 25 % des élèves décrochent au secondaire, le quart des jeunes enseignants quittent la profession dans leurs cinq premières années de pratique; l’école assume aujourd’hui des tâches qui étaient autrefois du ressort de la famille (décrochage des parents ?); les jeunes garçons québécois francophones de souche ne seraient pas plus diplômés qu’il y a 50 ans2 (+/-30 %); plusieurs écoles prennent l’eau ou sont rongées par les moisissures, pour ne nommer que quelques-uns des graves problèmes à corriger.

Maintenant

Discrétionnaire avant l’application des recommandations du rapport Parent, le budget de l’éducation l’est redevenu avec les compressions tous azimuts des dernières années (1,5 milliard $), les subventions par activité plutôt que par mission, etc.

Le seul regret de Guy Rocher, professeur émérite et ex-membre de la commission Parent, est d’avoir laissé passer le financement des écoles privées. « La part de marché » du privé au secondaire est passée de 5 % en 1970 à presque 22 % aujourd’hui, peut-on lire dans Le Devoir des 3 et 4 février 20183. L’école publique a réagi « en imitant le secteur privé subventionné, en optant à son tour pour l’écrémage », ajoutent les auteurs. D’où la ségrégation scolaire qui ne va pas sans conséquence sur le décrochage, notamment, et qui doit cesser selon Guy Rocher4.

« Alors qu’il est de plus en plus question de développer une économie du savoir, les régions de Montréal et de Québec continuent d’avoir un taux de grades universitaires inférieur à la moyenne des métropoles américaines. Le rattrapage scolaire a stagné de 2012 à 2016. Dans la grande région de Montréal, 44 % de la population de 25 à 34 ans est titulaire d’un diplôme universitaire, contre 51 % dans la région de Toronto5. »

On n’a plus les mêmes jeunes

Par ailleurs, la société s’est considérablement transformée au cours des 50 dernières années. Les jeunes d’aujourd’hui prennent plus de temps pour diplômer. Ils travaillent tout en étudiant. Ils peuvent s’arrêter un an pour faire un voyage. Et commencer un programme pour voir s’ils aiment ça. Cela pose problème aux « cégeps qui sont évalués au rendement, au taux de diplomation selon la durée des études, le taux de réussite après deux ans, etc.6», explique Mme Marie-Ève Blackburn du Cégep de Jonquière, dans un entretien à lire sans faute sur le Portail du réseau collégial.

Les bons coups

Certes tout n’est pas noir sous le ciel de l’éducation au Québec. Il se trouve qu’au cours des cinquante dernières années, le Québec a fait de grands bonds en avant. Parmi ses bons coups, mentionnons la création des cégeps, « un des bijoux du rapport Parent »7, ainsi que l’établissement du réseau de l’Université du Québec. Et les CPE.

En matière de compétences, aux termes des années de scolarité obligatoire, les jeunes Québécois d’une quinzaine d’années se classeraient aussi bien que ceux de la Finlande aux épreuves internationales du PISA (2013), notamment en mathématiques, sciences et lecture. Des résultats qui suscitent toutefois peu d’intérêt médiatique et politique au Québec, selon le chercheur Guy Pelletier. Ce genre de bonnes nouvelles seraient toujours un peu suspectes, souligne-t-il8.

L’absence de l’enseignement supérieur dans le discours politique tient-elle aussi d’un manque d’intérêt pour la question de la part des Québécois ou d’un « manque d’ambition », s’interroge le PDG de la Fédération des cégeps, Bernard Tremblay sur son blogue9?

Tant de questions et si peu de réponses, de vision surtout de la part des politiques.

Vraiment!

Deux ministères (Éducation et Enseignement supérieur) et cinq ministres de l’éducation depuis 2014 pour de si piètres résultats laissent songeurs. Peut-être est-il temps de revoir leurs rôles. Ne serait-il pas plus pertinent qu’ils s’en tiennent à une fonction de contrôle plutôt que de création de programmes et de réformes, et de gestion de bâtisses? Ne serait-il pas plus bénéfique de retourner leurs effectifs sur le terrain de l’enseignement? Nous faut-il une Commission nationale de l’enseignement indépendante du Ministère, à l’instar de la Finlande, au lieu d’une direction des programmes au sein du Ministère?

Faire autrement…

L’heure est sans doute venue d’entreprendre une autre grande réflexion pour réformer nos pratiques en éducation, comme l’avait fait en son temps la commission Parent qui est parvenue à transcender les oppositions politiques et à révolutionner l’école jusque-là sous la coupe des autorités religieuses.

Alors qu’on ne sait plus par quel bout prendre le problème, le mieux est de s’arrêter pour y réfléchir, pour définir une vision de l’éducation, l’école que nous voulons pour l’an 2050, les objectifs à atteindre, les moyens pour y parvenir, les mesures d’évaluation des résultats obtenus, entre autres. Pour rêver le futur…

L’éducation est l’ascenseur social par excellence, la preuve est faite. Elle doit devenir une priorité nationale. Ce qui amène à préconiser une stratégie nationale non partisane, portée par la société civile et non par un parti politique, mais plutôt par tous les élus. Il est temps de dépolitiser l’éducation comme on l’a laïcisée en appliquant les recommandations du rapport Parent.

Or l’éducation doit bénéficier d’un budget statutaire, majoré bon an mal an du taux de l’inflation ou des coûts de système. Un budget non négociable par le parti au pouvoir afin de briser le cycle construction/déconstruction ou, si l’on préfère, compressions et réinvestissements juste avant les élections. C’est là un sur-place coûteux, improductif et choquant pour la population. L’éducation doit être pourvue financièrement comme il se doit pour une priorité nationale, ce qui ne pose pas de problèmes à une époque qui n’a jamais produit autant de richesses.

Les membres du comité Chantier Éducation arrivent à la conclusion que les problèmes en éducation sont tels qu’ils ne peuvent se régler à la pièce à coup de mesures électoralistes, comme en propose la présente campagne. Cela s’est fait dans les années 60 avec la commission Parent, cela peut encore se faire en 2018 de se mobiliser pour réfléchir à l’éducation et en faire un grand projet porté par l’ensemble de la société.

Pour le bien commun des générations qui nous suivent, le comité entend faire la promotion de cette idée de projet et demande aux membres d’ETA de l’aider en ce sens en en parlant à leur tour.

« L’école de demain sera celle que nous allons faire […] L’école sera toujours la même […] puisqu’il faut apprendre à être et à devenir. Seuls les moyens sont différents10. » Oui, demain, il faudra encore savoir parler, lire, comprendre…

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Sources

  1. Le Devoir du 1er et 2 septembre 2018, Cahier spécial C, Alphabétisation.
  2. Institut de la statistique du Québec.
  3. « L’école que nous voulons », Le Devoir des 3 et 4 février 2018, Section Libre opinion, par Marie-France Bazzo, Salomé Corb, Alain Deneault, Anne Lagacé Dowson.
  4. « Faisons école ensemble», Le Devoir du 19 juin 2017, section Libre opinion.
  5. Les cégeps demandent une réflexion nationale sur l’enseignement supérieur, LaPresse+, Édition du 25 août 2018, section ACTUALITÉS, écran 15.
  6. Les étudiants d’aujourd’hui dans le monde d’aujourd’hui, 14 août 2018, Portail du réseau collégial du Québec.
  7. Le cégep : une réponse aux grands problèmes du système d’éducation d’avant le Rapport Parent. Entretien avec M. Claude Corbo, à l’occasion du 50eanniversaire de l’ouverture des premiers cégeps, 14 août 2018. Propos recueillis par Alain Lallier, Portail du réseau collégial du Québec.
  8. « La Finlande, le Québec et le PISA : une rencontre inattendue », in Social-démocratie 2.1, Le Québec comparé aux pays scandinaves, sous la direction de Stéphane Paquin, avec la collaboration de Pier-Luc Lévesque et Jean-Patrick Brady, 2eéd. revue et augmentée, 484 p.
  9. 50 ans après le rapport Parent, manquons-nous d’ambition?
  10. Bouchard, Serge, Les corneilles ne sont pas les épouses des corbeaux, Les éditions Boréal 2017, p. 63.

 

* Les membres du chantier 2018 sont Rose-Lise Blanchette, présidente d’ETA, Michel Boisvert, Claude B. Champagne, Claude Gravel, Serge Lavoie et Hervé Simoneau.


À propos d’Éducation 3e Âge (ETA)

Fondé en 1975 au Collège de Rosemont, ETA défend le droit à l’éducation des aînés-es depuis 40 ans. Il est rattaché au Collège de Maisonneuve depuis plus de 20 ans.

ETA est un regroupement non subventionné de quelque 350 retraités-es et préretraités-es qui a pour mission de favoriser le vieillissement actif et le bien-vieillir en offrant aux aînés-es, en collaboration avec le Collège de Maisonneuve, des activités culturelles, éducatives et sportives ainsi que des activités intergénérationnelles visant à créer des ponts avec les jeunes du Collège.

Son attachement à l’éducation publique est d’autant plus fort que l’organisme a été créé par des personnes qui n’avaient pas eu la chance ni les moyens d’étudier dans leurs jeunes années et qui ont voulu, la retraite venue, s’organiser dans le jeune réseau des cégeps qui leur a fait une place.

ETA a une tradition d’organisme engagé dans le communautaire et la défense des droits des retraités-es. L’Association québécoise de défense des droits des personnes retraitées et préretraitées (AQDR) et le Carrefour Montrose, entre autres, y ont vu le jour.

 


 

Appui à l’éducation publique lors des compressions budgétaires en éducation en 2016

Chantier Éducation est le projet autour duquel les membres d’Éducation 3e Âge se mobilisent pour l’éducation publique, à la rentrée de l’automne 2015. C’est aussi le nom du comité formé à la suite d’un remue-méninges pour déterminer les pressions que l’organisme peut exercer. Composé de six personnes, le comité rédige une proposition qui est présentée à l’assemblée générale annuelle de novembre 2015.

 

Le conseil d’administration obtient à l’unanimité le mandat d’action souhaité afin de prendre les mesures pertinentes pour défendre les cégeps et le réseau d’éducation publique. Parmi ces mesures, une lettre est adressée au ministre de l’Éducation ainsi qu’à tous les élus à l’étape de préparation du budget provincial. Les communiqués publiés reprennent la position énoncée dans la lettre aux élus, à savoir que le réseau d’éducation est menacé par les compressions répétées, la prolifération des frais et les orientations des réformes. L’organisme souligne l’importance d’investir dans l’éducation afin de s’assurer que tous les Québécois sont en mesure d’évoluer, tout au long de leur vie, dans la société du savoir : l’éducation est « … un des meilleurs outils contre la pauvreté et l’exclusion, ainsi que la meilleure garantie de santé et d’enrichissement collectif ». Et les défis sont considérables, dont celui de réduire le taux élevé d’analphabétisme qui nuit au développement du pays, fait-il valoir.

 

Éducation 3e Âge ne manque pas une occasion de souligner son attachement aux cégeps et à l’éducation publique, attachement d’autant plus fort que l’organisme a été créé par des gens qui n’avaient pas eu la chance ni les moyens d’étudier dans leurs jeunes années et qui ont voulu, la retraite venue, s’organiser dans le jeune réseau des cégeps qui leur a fait une place.

 

L’organisme exerce une vigie constante en matière d’éducation publique, à la hauteur de ses ressources.

 


Vivre-ensemble

Les aînés sont importants dans la majorité des cultures. Ils ont un rôle à jouer auprès des jeunes. Par leur présence à Maisonneuve, les membres d’Éducation 3e Âge montrent qu’il y a de la place pour tous, quels que soient l’âge, la culture, la couleur de peau, le sexe ou la religion.

 

Éducation 3e Âge, un modèle d’inclusion

En mars 2015, le ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur a confié au Collège de Maisonneuve le mandat de mettre en place des mesures d’appui à la diversité ethnoculturelle par le biais d’un projet-pilote sur le vivre-ensemble. Dans le cadre de ce projet, Éducation 3e Âge est apparu comme un modèle de diversité et d’inclusion pour le milieu.

 

À cette occasion, l’organisme a publié la brochure Partages intergénérationnels dans laquelle est décrit son rôle à Maisonneuve, de même que les nombreuses possibilités d’échanges pour enrichir les cours. On y trouve aussi des témoignages d’étudiants, de professeurs et de bénévoles d’Éducation 3e Âge, le plus fréquent étant : « La présence de retraités dans le milieu détruit plusieurs mythes sur l’âge d’or ».

 

Le projet Vivre-ensemble a eu pour effet de multiplier les contacts entre les retraités membres d’Éducation 3e Âge et les jeunes du Collège. Pour en savoir plus : Intergénérationnel.